"Je suis la conteuse qui examine vos vies fugaces, qui vous tient sous son regard, comme nous le faisions lors des longues nuits, lorsque nous riions à gorge déployée en nous demandant lequel d'entre nous serait touché par le prochai obus. Je le fais pour vous. Je ne peux que vous faire apparaître dans mon esprit et bâtir vos histoires tels des piliers dressés entre la terre et le ciel.
"J'ai continué à témoigner dans les écoles et les lycées, pour éviter que cette horreur ne se reproduise et pour que les générations futures n'oublient pas.
"Il a fallut la guerre, la guerre d'Algérie, pour avoir la certitude foudroyante que je suis la fille d'un Arabe et d'une Française, que la France a colonisé l'Algérie, que mon père est colonisé et ma mère colonisateur (colonisatrice?), que je suis divisée malgré le discours qui rassure : mes père et mère appartiennent à la même famille politique ... Une famille politique, c'est quoi, lorsque la famille naturelle, côté père, côté mère, est à ce point oubliée dans la parole quotidienne?"