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Titre du blog : Les lectures de Mina Strogoff
Auteur : mina-strogoff
Date de création : 05-06-2020
 
posté le 17-01-2021 à 20:53:37

L'architecte du sultan - Elif Shafak

"Se reniant à chaque pas, changeant d'humeur à chaque quartier, tendre et cynique d'un même élan, Istanbul donnait généreusement tout et dans le même soufle exigeait qu'on lui rende son cadeau. Une cité si vaste qu'elle s'étendait à droite comme à gauche, et vers le firmament, aspirant à s'élever, désirant toujours plus, jamais satisfaite. Mais toujours ensorcelante. Bien qu'étranger à ses façons, le garçon sentit à quel point on pouvait tomber sous son charme."

 

 

 

Editions Flammarion. 462 pages.

1ère parution : 2013 

 

Jahan, un jeune garçon débarque à Istanbul avec pour seul compagnon Chota, un éléphant blanc qu'il est chargé d'offrir au sultan Soliman le Magnifique. Une fois dans la ménagerie royale, il y rencontre les dompteurs des autres animaux, des courtisans plus ou moins hypocrites, et doit en plus composer avec un mercenaire qui lui a fait promettre de voler pour lui à l'intérieur du palais. A cela s'ajoute l'amour qu'il porte à Mihrimah, l'espiègle et inaccessible fille du sultan. Jusqu'au jour où il rencontre Sinan, l'architecte royal, qui décide de le prendre comme apprenti.

 

Le lecteur suit le personnage de Jahan depuis son enfance jusqu'à un âge avancé, avec pour toile de fond l'Empire ottoman du XVIè siècle. Le récit débute à l'époque de Soliman pour se terminer sous le règne de son petit fils Mourad. D'autres personnages historiques apparaissent comme Sinan ou Taqi al-Din. Elif Shafak précise dans une note qu'elle a pris quelques libertés avec les dates dans l'intérêt de son récit. Il ne s'agit donc pas d'une reconstitution historique à proprement parler, bien que le récit soit très érudit.

 

La principale force de ce livre à mon sens est la plume d'Elif Shafak; que j'ai trouvée très élégante et recherchée. J'ai particulièrement aimé ses descriptions très vivantes; les métaphores et comparaisons sont d'une poésie assez incroyable. Etant très amoureuse de la Turquie et surtout d'Istanbul, j'ai adoré la manière dont cette ville et son souffle si particulier étaient décrits. Son côté grouillant et cosmopolite sont très sensibles dans le roman; la ville apparaît presque comme un personnage à part entière.

 

En revanche, je pense que certains personnages auraient gagné à être développés. J'ai trouvé Jahan un peu trop naïf. C'est justement ce qui fait que, selon son ami Balaban, il n'est pas fait pour vivre à Istanbul. J'aurais aimé quelques protagonistes avec des tempéraments plus marqués. Certaines révélations qui arrivent vers la fin auraient eu plus d'impact si les personnages concernés avaient eu davantage de consistance. A plus forte raison dans un récit où les intrigues, complots et jalousies sont aussi présents.

 

Cela dit, je pardonne cette lacune et range tout de même ce titre dans mes coups de coeur car je ne me suis ennuyée à aucun moment, bien que le rythme soit lent. J'ai suivi avec plaisir les aventures de Jahan alors qu'il aidait son maître à ériger la mosquée de Solimane, puis celle de Selim, puis l'observatoire etc. La plume d'Elif Shafak m'a faite passer par plein d'émotions ; j'ai été ravie d'ouvrir 2021 avec cette fresque qui a ravivé mes souvenirs d'Istanbul.

 

Je recommande.