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Titre du blog : Les lectures de Mina Strogoff
Auteur : mina-strogoff
Date de création : 05-06-2020
 
posté le 26-10-2020 à 10:45:57

Enfants de Nazis : Tania Crasnianski

"Il est très difficile pour des enfants de juger leurs parents. Nous manquons de distance et d'objectivité vis-à-vis de ceux qui nous ont mis au monde et élevés. Plus grande est la proximité affective, plus compliqué est le jugement. De l'adhésion au rejet total, comment vivre avec son passé familial, quand il est aussi effrayant?" 

 

 

 

Editions Grasset & Frasquelle. 280 pages.

1ère parution : 2016 

 

Lecture pour le Pumpkin Automn Challenge 2020.

Thème : "Les supplices de la belladone". Lire un livre avec la couverture noire

 

Tania Crasniasnki dresse ici un portrait des enfants de dignitaires nazis tels que Himmler, Hess, Speer, Höss ... Chaque chapitre re-situe la famille en question dans son contexte, explique comment elles en sont arrivées à côtoyer le Fürher et participer à l'extermination des Juifs d'Europe tout en menant une vie de famille en privé. Sont abordées également les rapports entretenus par ces dignitaires nazis avec leurs propres enfants; qu'ils soient fusionnels, tendus ou quasi-absents. Les différentes sections traitent également des procès intentés aux responsables, de la manière dont leurs familles et particulièrement les enfants l'ont vécu, ainsi que de leur place dans la société qui suit la chute du IIIè Reich.

 

Si tous ces enfants ont en commun d'avoir grandi dans une tour d'ivoire dans des familles puissantes ; ils diffèrent en revanche dans leurs réactions en découvrant l'étendu des crimes de leurs pères respectifs. Leurs attitudes dépendent énormément de la relation qu'ils entretenaient auparavant avec leurs parents. Gudrun Himmler par exemple, qui était très proche de son père, reste persuadée que ce dernier est innocent des crimes dont on l'accuse et va jusqu'à embrasser ses idéaux. Il en va de même pour Edda Göring. En revanche, Rolf Mengele, même si il ne diabolise pas entièrement son père, éprouve un sentiment de répulsion et adopte des idées politiques diamétralement opposées aux visions eugénistes de son père. N'ayant jamais vraiment côtoyé son père, il lui est moins difficile d'affronter la réalité que pour les enfants ayant eu un lien affectif fort. Quant à Niklas Frank, il critique ouvertement son père dont il n'a jamais été proche; ainsi que le peuple allemand en lequel il dit avoir perdu confiance.

 

J'ai également remarqué que le sentiment de honte et de culpabilité était en général plus présent chez les neveux / nièces et chez les petits enfants que chez les descendants directs, à plus forte raison quand ces derniers ont eu des liens forts avec leurs pères. Tania Crasnianski fait état de neveux et nièces de nazis ayant choisi de se faire stérilier pour éteindre la lignée, de peur d'engendrer d'autres monstres ; comme si la cruauté faisait partie des gênes de la famille.

 

Une lecture que j'ai trouvé fort intéressante, avec une bibliographie plutôt fournie, ce à quoi je suis sensible.